Et voici ma revue, consacrée à la SEIKO référence 6138-0030, connue sous le nom de Kakume (« œil carré », libre traduction du japonais « Shikaku » qui veut dire Carré et « me » qui veut dire Œil) ou Big blue pour les anglo-saxons.

Un peu d’histoire :
Les années 1970 ont été riches en innovation. Je ne reviendrais pas sur la paternité du premier chronographe automatique, qui provoque des débats épiques et passionnées. Toujours est-il que SEIKO est un des premiers à commercialiser de série un chronographe automatique, référence 6139 (mai 1969)
Et quelques mois plus tard, en 1970, la version 6138 qui comporte en sus un remontage manuel additionnel et un compteur totaliseur de 12h. SEIKO lance à cette période une série de chronographes plus désirables les uns que les autres (série des Speed-Timer). Pour preuve, des extraits des catalogues (1970 – 1975). Je mets en garde les plus fragiles et sensibles d’entre nous, car les images suivantes peuvent entraîner de graves séquelles, une persistance rétinienne suivie de nombreuses CHI annonciatrices de problèmes bancaires, conjugaux, voire pire, un dédain complet pour les productions de nos amis helvétiques et, de fait, un honteux bannissement des forums élitistes – il ne vous restera plus qu’à hanter fébrilement les forums des pestiférés du luxe et du bon goût.
Ces chronographes sont un condensé de la créativité débridée des années Flower Power. Des formes innovantes, des couleurs flashies, une mécanique aboutie, une image assumée liée à la vitesse.


Pour avoir malheureusement consulté les sites des pestiférés sub-cités, j’ai bien malgré moi été influencé par quelques détenteurs de ces merveilles. Pas besoin de les citer, nous les connaissons tous ces viles tentateurs. Plus rien ne me retenait, il fallait que je possède un de ces chronos… mais lequel…. La Bulllhead, l’UFO, la Panda… non, c’est la magnifique Kakume bleue qui m’attirait… mais comment la trouver… et c’est là que tout se complique…. Comment reconnaître une Kakume d’origine, non traficotée par Monsieur Lee et revendue à prix d’or par viendezachetermesSEIKONOS@arnaque.com ? Difficile… mais à cœur vaillant, rien d’impossible. Heureusement, Google est mon ami et les japonais aussi. Après une recherche qui fait passer la quête de Frodon Sacquet et son anneau pour une charmante promenade bucolique dans la campagne Haut-Marnaise, je trouve les informations pour séparer le bon grain de l’ivraie. Attention là encore pour nos amis les plus fragiles, possesseurs d’une Kakume. Les images suivantes pourraient provoquer un chaos émotionnel… quoi, ma Kakume NOS achetée à prix d’or n’est qu’un vulgaire Fake ??? …. On retrouve ainsi, sous des couleurs Manganesques, en bleu le bon grain, en rose l’ivraie…

Ainsi, SEIKO a sorti trois modèles de Kakume, que l’on reconnait par la dénomination à gauche du cadran et la forme des aiguilles. SEIKO 5 Sports Speed-Timer, présentée sur les catalogues des années 1974 à 1976.
SEIKO Speed-Timer qui apparaît pour la première fois sur le catalogue de l’année 1977 (pour disparaître du catalogue en 1979, remplacée par de méchants Quartz).
Et SEIKO Chronograph Automatic réservée pour le marché international (voir l’excellente revue de Copeau). De plus, mais je ne m’y étendrais pas, une version couleur champagne et orange, plus rare que le modèle bleu.
Voilà, mon choix est fait, ce sera une Kakume bleue, version Speed-Timer réservée pour le marché japonais (pourquoi, parce que je préfère ses aiguilles, que je voulais que le mot Speed-Timer apparaisse sur le cadran, et que j’adore les montres bleues). Bon, il n’y a plus qu’à se mettre en chasse…. Et là, grave désillusion, que des fakes, des fakes, des fakes… ou des australiens qui vendent des pseudo-NOS à prix d’or….En parlant de prix, je constate qu’ils ont tendance à monter depuis quelques mois. Compter un peu plus de 200 euros pour des modèles aftermarket assez abimés, jusqu’à plus de 800 euros pour des modèles quasi NOS, ce qui reste malgré tout très raisonnable pour la qualité de la montre, comparé à la hausse des prix hallucinante des chronographes Suisses et Français (type Yema) des années 1970. Le désespoir m’assaille, je n’ai plus goût à rien, je m’en vais le poignet nu, quand, tel Zorro sur Tornado, la French Connection Marseillaise arrive à mon secours. Xavier AKA Land Rover, élément générateur de mes principales CHI, débarque sans coup férir avec sa magnifique Kakume de mes rêves… Deux échanges de MP plus tard, mon sauveur empaquette la belle direction Versailles… Là, je vous épargne les aléas des saisons et du grand cycle de l’univers qui m’éloignent de ma Kakume pendant deux mois (reçu début février, anniversaire fin mars… vous avez compris, Madame Warson ne plaisante pas avec les dates). Et enfin, elle est là, à mon poignet…. Présentation de la belle :

Technique et calibre :
Elle est motorisée par le calibre automatique réf. 6138, 21 rubis, 21600 alternances par heure (27 mm de diamètre, 7,9 mm de hauteur). Chronographe automatique équipé d’un mouvement autorisant le remontage manuel auxiliaire, roue à colonne et embrayage verticale (ce qui évite le saut de l’aiguille des secondes au moment du déclenchement du chronographe). Elle propose de plus le jour et le quantième. A noter que pour une montre de 40 ans, la précision est assez stupéfiante, digne d’une certification COSC (retard constant de moins de 5 s par jour, mesure prise sur plus d’une semaine – le fait que ce retard soit constant prouve la grande précision chronométrique de ce calibre – l’antépénultième propriétaire indique que le mouvement a été révisé, ce que je veux bien croire).
Le boitier :
Le boîtier est en acier inoxydable. D’un diamètre de 43 mm très actuel, elle est facilement portable même pour les petits poignets du fait de ses cornes très courtes. Elle allie les courbes et les arrêtes plus franches qui lui donnent un aspect sportif. Les modèles d’origine alternent des surfaces polies et brossées (cf. cette photo d’un très bel exemplaire, vendu 870 euros sur Urhform le 20 mars 2016 – crédit breitlig345).

Mon exemplaire, qui accuse ses 40 ans, a perdu quelques brossages mais reste malgré cela très propre (boitier nettoyé et poli). La finition est d’un très bon niveau.
La couronne de mise à l’heure est classiquement située à trois heures. Elle n’est pas vissée, pas protégée et n’est ornée d’aucun logo. Tirée d’un cran, elle permet le réglage du jour et du quantième (en tournant la couronne dans un sens ou dans l’autre). Le deuxième cran permet le réglage classique de l’heure. Les deux poussoirs du chrono sont étrangement dissymétriques, du fait de la conception du module de chronographe. Leur fonctionnement est classique (celui du haut permet le lancement et l’arrêt du chronographe, celui du bas est utilisé pour la remise à zéro).

La glace n’est pas d’origine. Elle dépasse légèrement de la lunette.


Le cadran :
Le cadran fait tout le charme de cette montre, avec ces deux compteurs caractéristiques carrés.
Comme toujours, Seiko nous régale d’un cadran de haute volée. En fonction de l’incidence lumineuse, ce cadran passe du noir le plus profond au bleu azur.

Le guichet du jour et de la date rectangulaire, cerclé de métal, est situé à trois heures. La date et le jour sont imprimés en blanc sur fond noir (excepté pour le dimanche qui apparaît en rouge).


Ce guichet est lisible et bien intégré au cadran. Comme je suis complètement « fluente » en japonais, les jours sont en Kenji, mais peuvent être indiqués en anglais. La littérature est assez sobre…. SEIKO en blanc, Speed-Timer en orange avec une police en italique qui donne un dynamisme à l’ensemble.

On retrouve aussi le logo Suwa à gauche du guichet du jour (une des deux usines de Seiko). En bas, l’indication JAPAN 6138 à gauche du cadran, 0045 T à droite. Les indexes sont des appliques en acier polis avec une barre centrale blanche (non luminescente). Les aiguilles sont en acier polis, avec une barre centrale blanche, à l’image des indexes. La seconde centrale du chronographe est en acier rouge, de même que les deux aiguilles des compteurs auxiliaires.

Les deux compteurs auxiliaires carrés sont de couleur blanche. Un compteur en haut pour une mesure de l’heure chronométrée sur 12 heures, un second compteur en bas pour le décompte des minutes, sur 60 minutes, avec une double indication en noir (10 – 20 – 30 minutes) et en orange (40 – 50 – 60 minutes), rappelant la police du Speed-Timer.

Le rehaut est en acier poli. Il éclaire le cadran tel un miroir.

La lunette d’un magnifique bleu comporte une échelle tachymétrique (elle doit être en aluminium). Sur toute les publicités et magazines d’époque consultés, la mention « TACHYMETER » est toujours en lettre blanche, à l’image de mon exemplaire. Ainsi, il me semble que les lunettes comportant une écriture orange de la mention « TACHYMETER » sont Aftermarket…. Mais je peux me tromper et que celui qui ne s’est jamais trompé me jette la première Speed. Les indexes sont carrés de couleur orange. Mon exemplaire comporte quelques marques du temps, qui fait tout son charme…

Le fond est en acier, et comporte les informations habituelles (numéro de série, lieu de fabrication….). Selon le numéro de série, mon exemplaire date du mois d’août 1976.
Le bracelet :
SEIKO a équipé les Kakume de deux bracelets différents en acier. Un de type Fishbone

et un avec des maillons plus classiques. C’est ce bracelet que je possède. L’acier est brossé et le bracelet alterne des maillons de différentes tailles. Il est de très bonne qualité à mon avis.

La boucle déployante est signée des mentions SEIKO et Speed-Timer. La particularité de cette boucle est d’avoir un système de rallonge automatique par coulissage de deux parties métalliques retenues par un ressort. Cela permet au bracelet de s’ajuster parfaitement au poignet, même en été. C’est certainement un de mes bracelets les plus agréables à porter. Une réussite.

A noter que l’entre corne de la montre est assez petit (18 mm), comparé à la taille du boitier. C’est pourquoi je trouve cette montre plus jolie avec un bracelet épousant la forme du boitier, comme les deux bracelets d’origine.
Voilà, j’espère que cette revue vous aura distrait quelques instants et vous aura fait découvrir une nouvelle facette de ces chronos vintage SEIKO.















Jean-François