Nous avons vu que François-Paul Journe est une maître horloger accompli puisant dans les travaux de ses illustres prédécesseurs les principes présidant à ses sublimes innovations.
Ainsi dans ce post sur le Chronomètre à Résonance je soulignais que le système avait été élaboré par Antide Janvier et ô combien amélioré par F.P. Journe. Mais il s'est aussi inspiré du tourbillon Breguet, le chronographe sectoriel et RAZ instantanée, etc...
Le mouvement Journe à résonance :
Crédit photo : Guido Mocafico / Steidl
La devise de Journe, Invenit et Fecit ("inventé et fabriqué") provient elle-même des inscriptions que l'on trouvait sur les garde-temps des XVI, XVII ou XVIIIème siècles.
©Antiquorum via Lacotedesmontres
Et monsieur Journe est un véritable inventeur. Le Centigraphe Souverain, le Chronomètre à Résonance, le calibre Octa qui permet d'intégrer n'importe quelle complication sans augmenter le volume du mouvement, c'est à dire non par le biais de modules additionnels mais directement sur la platine. Ainsi tous les mouvements de la gamme Octa possèdent les mêmes dimensions. Ou encore la Sonnerie Souveraine devant faire fonctionner la montre et la sonnerie avec l'énergie d'un unique barillet. Autant de montres magnifiquement compliquées, superbes de savoir-faire et de virtuosité.
Le calibre Octa :
©Watchmundi.
La Grande Sonnerie :
©Luxist.com
Ici nous parlerons (un peu) du Chronomètre Optimum.
©leblogdesmontres.com
On y trouve 3 éléments remarquables : l'usage de deux barillets inspiré par A.L. Breguet, le "remontoir d'égalité" (lui aussi inspiré par Breguet) et l'Echappement Bi-axial Haute Performance (EBHP) (toujours inspiré par Breguet).
Abraham Louis Breguet utilisait deux barillets dans ses montres dites "perpétuelles", entendez par là "automatiques".
(Pour mémoire, je vous remets un éclaté de mouvement pour que vous puissiez situer le barillet ainsi qu'un schéma)
©hautehorlogerie.org
©http://membres.multimania.fr/montreenfolie
Ceci permettait de réduire l'usure des pièces en limitant les frottements et à stabiliser plus efficacement le couple délivré par les deux ressorts plutôt que par un seul.
Un peu sur le même principe que celui de l'échappement que nous verrons plus loin, l'idée ici est de tirer l'énergie de deux source - deux ressorts - de façon à ce que chacun séparément en produise moins. ils sont alors soumis à de moindres contraintes, ce qui les fatigue moins.
Breguet en parle ainsi :
"On sent aussi que le mécanisme [...] qui est destiné à remonter la force motrice tout entière, doit vaincre, de plus, les frottements de ses propres mobiles, et que ces deux surcroîts de résistance se trouvent à la fois au désavantage du remontoir par les mouvements du porter. Nous sommes parvenus à faire disparaître cette difficulté [...] principalement ici par l'emploi de deux barillets dentés, convenablement disposés pour agir tous deux sur le premier mobile.
Nous avons ainsi deux ressorts, chacun de moitié plus faible, qui sont d'une élasticité plus étendue, et en même temps plus énergiques, parce qu'ils ne grippent point. Etant plus longs du double [...] et n'agissant que par leur tour de bande, ils sont loin de se trouver dans un état forcé et ne sont plus exposés à se rendre, ou à se casser.
Mais ce qui est le plus avantageux ici, [...] c'est qu'agissant sur deux points opposés à l'axe du premier mobile, ils en soulagent si bien les pivots, que ceux-ci en éprouvent beaucoup moins de frottements par l'action de deux barillets, que par la force, moitié moindre, d'un seul."
Un autre dispositif fascinant de ce Chronomètre Optimum est le "remontoir d'égalité".
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Le "remontoir d'égalité", perfectionné par Journe dès 1982, permet de rendre constant le couple délivré par le ressort moteur, ici les deux barillets. Le temps de cette explication considérons les deux ressorts de barillets comme étant un seul et unique ressort. Lorsque le ressort est armé à fond et lorsqu'il est presque entièrement vidé, il ne délivre pas la même énergie. Le "remontoir d'égalité" est alors positionné entre le barillet et le balancier afin de compenser ses variations. il est muni de son propre ressort, plus petit que le ressort de barillet. Il est remonté par le ressort de barillet, c'est à dire qu'une partie de l'énergie délivré par celui-ci est stockée dans le ressort du "remontoir d'égalité". C'est ce dernier qui, en se détendant, va transmettre son énergie au balancier. Etant plus petit, les différences d'amplitudes sont plus réduites que celles du ressort de barillet.
Afin de rendre l'action de ce "remontoir d'égalité" visible le cadran est ajouré mais nous avons aussi une seconde morte à l'arrière de la montre. Sa course est anti-horaire et elle montre la fréquence du ressort du "remontoir d'égalité" qui est donc d'une seconde.
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La première Journe avec "remontoir d'égalité", le Tourbillon Souverain :
©thepurists.net
Terminons enfin avec l'Echappement Bi-axial Haute Performance (EBHP)
Il s'agit d'un échappement naturel et à impulsions directes. "Naturel" parce qu'il se rapproche de l'échappement dit "naturel" de Breguet mettant en jeu deux roues d'échappement. Et "à impulsions directes" parce que les impulsions sont transmises directement sur l'axe du balancier. Cet échappement répartit l'impulsion sur deux roues, du coup les mouvements sont plus souples et ne nécessitent pas de lubrification.
Un petit schéma :
©Horlogerie-suisse.com
Je vous laisse sur cette vidéo montrant un modèle en 3D de cette superbe mécanique.
Merci de votre attention.
sources :
- leblogdesmontres.com - horlogerie-suisse.com - ian Skellern @ thepurists.net - hautehorlogerie.org - Luxist.com - http://membres.multimania.fr/montreenfolie - "La montre à remontage automatique", J.C. Sabrier Editions du Cercle d'Art